Collaboration avec Vanessa Cao, artiste plasticienne
Amandine FABRY, designer textile & Vanessa CAO, plasticienne. Accoutumée chacune à modeler la matière, ces nouvelles partenaires de manipulation l’investissent dans une hybridation pastichée.
Si l’expérimentation est au coeur de leur pratique respective, la recherche commune se situe au delà du geste. Les 4 mains à l’oeuvre façonnent une même matière dont les gestes de construction se sont tantôt soustraits dans une forme d’invisibilité, tantôt additionnés dans l’épaisseur du tissu. La rencontre plastique s’opère dans une précision immatérielle dont la tangibilité s’extrait par cliché pour dépeindre les contours d’une sensibilité commune. Le point de connexion qui a aimanté ce binôme est vraisemblablement la combinaison d’une approche partagée du potentiel factice de la couleur et d’un attrait commun pour un certain détournement d’éléments végétaux.
Le lexique qui évoque ce travail conjugué est résolument textile, il est question de croisements, de trames, de vibrations, de perceptions, d’impressions, de réseaux, de lignes et nécessairement d’écriture. Ce petit dictionnaire commun fait naitre un langage à mi chemin entre photographies et textiles. Le tissu simule la photo qui a été elle-même tramée d’une écriture textile. L’impression dégagée par les clichés est aussi textile que les tissus tissés et les tissages sont aussi (photo)graphiques que les images. Le papier supplée le fil, la trame translate le cliché.
La réalité de la matière, physique ou sensible, est définie par la suggestivité de la trame qui est questionnée dans sa définition, dans sa sémantique et dans ses mises en oeuvre. La matière du projet se situe précisément aux croisements de réseaux de trames effectives ou fictives. Cette confusion de perception entre textile et image est accentuée par l’intégration de couleurs aussi factices que réelles.
La description du processus est incarné par sa simulation: une sorte de mise en avant de la structure perceptible du tissu et de mise en abîme du jeu de ses fils entrelacés. La couleur et les textures des clichés sont appliquées sur l’apparente simplicité du code technique du tissage. Un jeu factice, tiré d’un principe de construction textile, est exploité comme artifice. Il trouble, modifie, efface ou travestit l’ambivalence des simulations textiles.
Juxtaposition d’un cliché graphique et d’un textile
Parallèle entre textile et cliché graphique
Cohabitation de textiles et de compositions graphiques se répondant mutuellement dans un dialogue qui joue de leur langage respectif.
La vitalité de la couleur, sa force cosmique, sa facticité et la perception que les deux créatrices en ont chacune respectivement est l’élément qui a polymérisé les envies et lié les sensibilités dans ce projet. La rencontre plastique se construit et rebondit sur leurs points de complémentarité pour renforcer leurs résonances chromatiques.
Les variations d’échelles et les différences des rythmes génèrent des vibrations tout en soustrayant à la couleur toute réalité substantielle et en en faisant une apparence, quelque chose de changeant, de furtif.
Les nuances de gris se substituent à la couleur pour rendre l’écriture textile optique. La couleur tantôt fidèle à l’objet de captation, tantôt imaginée s’éteint pour laisser dialoguer les réseaux.
Le tissu n’a d’existence et de solidité que par l’entrecroisement des fils. Le réseau de ses fils entrelacés distinctement perceptible lui donne à lui seul toute sa réalité. Ce jeu universel de construction aussi complexe qu’évident porte en lui un langage qui mobilise quelques fonctions mystérieuses mais certainement nécessaires d’entremise entre le dedans et le dehors, entre l’intime et l’ailleurs.
A la fois porteur d’une dimension narrative et d’un caractère essentiel, le textile a mis en mouvement l’imagination de ce duo. D’abord traité dans ce projet comme sujet, il est assez naturellement devenu objet. La série Epaisseur se dévoile à travers une collection de tissages nommée va, vibre et adviens ce que factice saisit.